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du Pro Bono

L'engagement a-t-il un genre ?

L'engagement a-t-il un genre ? C'est une question à laquelle nous avons tenté d'apporter des réponses !
Manon Philippe
21 déc. 2022

Mercredi dernier nous avons eu la chance de recevoir Laurence Lepetit, déléguée générale France générosités et ambassadrice parité, Elisa Braley présidente de la commission égalité Femmes-Hommes de 2015 à 2022 au sein du conseil supérieur de l’ESS, et Natalie McCafferty, chargée de projets égalité femmes-hommes chez ESS France , pour un temps d’échange sur le genre et le monde de l’engagement.

Nous avons souhaité nous interroger : dans quelle mesure le bénévolat et l’engagement reproduisent ou non les inégalités sociales et les biais de genre présents dans notre société et dans le monde du travail actuel ?

L’engagement, une affaire de femmes ?

Les femmes réalisent 72% du travail domestique. Pour elles, seul un tiers du temps travaillé est rémunéré contre les deux tiers pour leurs homologues masculins. Elles bénéficient de moins de trois heures de temps de loisir par rapport aux hommes, et sont majoritaires dans les métiers du soin, de la solidarité et de l’éducation. La liste des inégalités est longue… Mais qu’en est-il de l’engagement ? Les femmes offrent-elles plus de temps « gratuit » que les hommes ?

Le constat pourrait bien vous surprendre ! On compte 22 millions de bénévoles en France, et si près de 38% de la population est engagée, la population bénévole est plutôt paritaire.

L’étude « Genre et bénévolat » menée par ESS France propose une approche genrée de la pratique bénévole en France et dresse les constats suivants :

-Les femmes sont quasiment aussi présentes que les hommes dans la population bénévole

-Le nombre d’heures de bénévolat par an est plus élevé chez les hommes que chez les femmes (médiane comprise entre 36h et 45h pour les femmes, entre 52h et 63h pour les hommes)

« Dire que les femmes font moins d’heures de bénévolat que les hommes peut paraître étonnant, si nous avons une représentation du bénévolat assimilé au don de soi pour les autres : les actions caritatives, l’aide humanitaire, le soin des jeunes et des personnes âgées. Mais le périmètre du bénévolat est plus large : sont considérés comme bénévoles les personnes ayant donné sans rémunération leur temps, quel que soit le nombre d’heures ou le statut du bénévole – qu’il soit membre ou non d’une structure. S'impliquer dans un club de foot, organiser un diner de réseautage rentrent aussi dans le périmètre du bénévolat. » Natalie McCafferty, Chargée de projets égalité Femmes-Hommes, ESS France

Même constat dans le bénévolat dit de « gouvernance ». Si les femmes représentent 69% des salariés dans l’économie sociale et solidaire, elles sont seulement 45% à occuper des fonctions en conseils d’administration ou aux bureaux de ces mêmes structures. Chez France générosités, un travail est en cours pour porter le sujet de la parité dans les gouvernances associatives. Une étude sur la parité et la représentativité des femmes au sein des membres de France générosités (125 structures interrogées) a dessiné plusieurs tendances :

- Les femmes représentent 22% des présidentes et 46% des dirigeantes

- Seuls 44% des conseils d’administration sont paritaires

- Des différences sont observables en fonction des structures : on retrouve 28% des femmes à la présidence et 46% à la direction générale pour les associations. Côté fondations les inégalités s’accentuent avec seulement 15% de femmes à la présidence mais 49% à la direction générale.

Logique et des inégalités de genre mises à l’œuvre dans le monde associatif

Si la population bénévole est paritaire, une logique de genre bien réelle est à l’œuvre : la nature de l’engagement varie en fonction du sexe.

« La parité n’est pas seulement quantitative mais aussi qualitative. Bien souvent les femmes n’occupent pas les postes de pouvoir. Au bureau des associations, la fonction de secrétaire générale est par exemple très féminisée. » Elisa Braley, présidente de la commission égalité Femmes-Hommes de 2015 à 2022, conseil supérieur de l’ESS

Et en effet, les femmes représentent 37% des présidentes, 38% des trésorières, 54% des secrétaires.

Il existe également une corrélation entre la taille de la structure, le montant des ressources d’une organisation et la présence de femmes. D’après l’étude sur la parité menée par France générosités, les femmes sont plutôt bien représentées à la présidence ou à la direction générale des petites structures, moins dans les plus grandes organisations : les femmes représentent 48% des présidentes des structures employant 4 à 9 salariés, mais sont seulement 18% à la présidence des structures employant 50 salariés et plus.

Autrement dit, on retrouve le phénomène bien connu de « plafond de verre » dans le bénévolat de gouvernance. Elisa relève des freins logistiques (double journée de travail, inégale répartition des tâches ménagères et parentales avec moins de temps à consacrer aux loisirs) à la prise de responsabilités des femmes, mais aussi des freins sociologiques : articulation des temps de vie, rôle modèle tendent à entrainer de l’autocensure de la part des femmes.

« On voudrait bien plus de femmes mais il n’y a pas de candidatures. Les femmes se sentent moins légitimes pour occuper ces postes. Il faut sortir de l’invisibilisation et favoriser la prise de responsabilités » Laurence Lepetit, Déléguée générale, France générosités

Enfin, il existe une répartition genrée des activités bénévoles et des secteurs dans lesquels les Français s’engagent. Les femmes sont surreprésentées dans les secteurs de l’aide humanitaire (60%) de l’éducation (68%), et les hommes dans le sport (68%). Certaines études de développement ont constaté que lorsque les femmes gagnent ou reçoivent de l’argent, cette rémunération est davantage dépensée dans la scolarité, les dépenses relatives à la santé des enfants que lorsque les pères reçoivent cet argent. “Lorsque les femmes ont de l’argent, elles le dépensent davantage sur les autres que les hommes. Quand elles ont du temps, c’est pareil.” souligne Natalie

Quelles solutions pour lever les inégalités dans le monde de l’engagement ?

« Tendre vers une gouvernance inclusive n’est pas simple, il y a un premier investissement qui consiste à rendre visibles et attractives les offres pour les femmes. » relève Laurence.

Il faut que le recrutement soit pluriel dans sa source (interne ou externe), il y a aussi un vrai sujet de vivier et de mise en réseau : comment mieux faire connaître le modèle associatif et le bénévolat de gouvernance ?

Un enjeu de sensibilisation et de "rôle modèle" qui sont au cœur du projet Matrimoine de l’ESS, une série d’outils pédagogiques réalisés pour sensibiliser à l’ESS et à l’égalité femmes-hommes. Le projet est destiné à valoriser le parcours des femmes qui font l’ESS aujourd’hui à travers une série de portraits.

Enfin, requestionner les modes de gouvernance et leur fonctionnement de manière transversale est essentiel : Dois-je accueillir de nouveaux adhérents ? Quelle place leur donner dans la gouvernance ?

« La parité dans les instances de gouvernance bénévole ce n’est pas juste une histoire de mise en conformité et de quota, c’est pouvoir travailler sur d’autres modèles plus inclusifs qui vont pouvoir porter les plans d’actions des associations. C’est surtout un enjeu de cohérence pour les structures de l’économie sociale et solidaire.” rappelle Elisa Braley


Bibliographie conseillée :

Genre et bénévolat. Femmes et hommes, un même engagement bénévole ?

Etude sur la parité 2022 au sein des membres de France générosités – mars 2022

Rapport sur l’égalité femmes-hommes dans l’ESS, Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire

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